Les endroits remarquables
L’église Saint-Thomas outre sa remarquable architecture regorge de trésors intérieurs tels que ses célèbres orgues, sa riche collection de monuments funéraire, ses vitraux ou encore sa magnifique fresque datant du XVème siècle, autant de merveilles à découvrir.
L’église porte le nom du disciple Thomas qui a douté de la résurrection du Christ. Il refuse de croire avant d’avoir vu les marques de la Crucifixion. Dans le récit de l’évangéliste Jean, une rencontre personnelle entre Thomas et le Christ va permettre au disciple d’accueilli le ressuscité comme son Seigneur et son Dieu (cf. Jean 20, 24-29). Cette incrédulité lui vaut le surnom de « Thomas le sceptique ».
Cette rencontre est représentée à quatre endroits différents dans l’église :
- Sur le médaillon central du grand vitrail au-dessus de l’orgue Silbermann.
- Sur la face avant de l’autel. Recouvert d’un plateau en chêne, l’autel de grès clair date de 1744. A chaque angle, un ange agenouillé soutient de ses bras tendus le dessus de l’autel. Sur le panneau central, le bas-relief représente de nouveau la scène de l’apôtre Thomas touchant la plaie du Seigneur.
- Sur la clé de voute de la chapelle Saint-André, datant de la fin du XVème siècle. Dans celle-ci, on retrouve également sur le mur assez étroit entre les deux fenêtres les restes d’une fresque de la crucifixion. Elle présente la particularité que le Christ y incline sa tête à droite tandis qu’il la tient ordinairement penchée à gauche dans les tableaux du Moyen-Age.
- Sur le tympan du transept sud. Ce tympan provient sans doute de l’ancien portail occidental et se trouve actuellement sur la cloison séparant le croisillon sud du transept du chœur. Cette œuvre a été réalisée vers 1225 par les sculpteurs venus de Chartres pour travailler à la cathédrale auxquels nous devons par exemple les célèbres statues de l’Eglise et de la Synagogue au portail sud ou encore le Pilier des Anges. Elle représente le Christ ressuscité, entouré des disciples Pierre et Jean, saisissant la main de Thomas pour lui faire toucher la blessure qu’il porte sur le côté, plaie occasionnée par la lance du soldat romain qui s’était ainsi assuré de sa mort.
L’église Saint-Thomas est connue pour abriter deux orgues d’une facture remarquable.
Orgue de tribune Silbermann
Selon le théoricien de la musique Johann Franz Lobstein dans un essai publié en 1840, l’église Saint-Thomas serait dotée d’un orgue de tribune depuis le début du XIVème siècle remplacé ensuite en 15115 par un instrument construit par Hans Schentzer et définitivement démonté en 1737 par Jean-André Silbermann.
Des treize orgues construits par la famille Silbermann, celui de Saint-Thomas est le mieux conservé et celui ayant gardé suffisamment de matériel d’origine pour pouvoir encore mériter l’appellation « orgue Silbermann ».
Les Silbermann sont une grande famille strasbourgeoise d’origine saxonne de facteurs d’orgue, qui peuvent être comparés aux Stradivarius une famille de grands luthiers italiens. Ils ont toujours refusé d’intégrer dans leurs ouvrages des éléments plus anciens. C’est donc un orgue entièrement neuf que Jean-André Silbermann, alors âgé seulement de 25 ans, fut chargé de construire en 1737 pour remplacer l’ancien instrument qui avait encore gardé sa structure gothique.
C’est pour Jean-André Silbermann l’occasion de montrer son talent après la fin de sa formation à Paris avec François Thierry et après avoir tout juste repris l’entreprise familiale après la mort de son père. Les ateliers se situaient au quai Finkwiller à deux pas de l’église Saint-Thomas.
L’orgue, achevé en 1741, comprenait 31 jeux sur trois claviers (grand orgue, positif de dos et écho) et un pédalier. Si l’esthétique sonore est encore très proche de celle de l’orgue d’Ebersmunster construit par son père, le dessin du buffet est quant à lui inédit. Comme traditionnellement, le buffet, dessiné par Jean-André et réalisé en chêne par un artiste local ici le menuisier Riedinger, est idéalement proportionné à l’édifice et s’adapte parfaitement à la rosace qui le surmonte. Les tourelles trilobées du grand orgue et le nombre d’or présent dans les proportions du buffet sont caractéristiques des réalisations de Jean-André. On peut aussi noter les magnifiques panneaux de style rocaille. La balustrade, elle, remonte au XVIIème siècle et était à l’origine peinte à la détrempe en gris.
L’orgue de Saint-Thomas comptait parmi les plus belles réussites de Jean-André notamment pour son excellente sonorité. Il fut loué par Wolfgang Amadeus Mozart lors de son bref passage à Strasbourg en 1778.
Aux 19ème et 20ème siècles, l’orgue a connu plusieurs transformations et finit dans un assez mauvais état. C’est uniquement grâce à l’intervention du futur prix Nobel de la Paix Albert Schweitzer, qui argua de la prédilection de Jean Sébastien Bach pour les orgues Silbermann, que celui-ci fut sauvé de la destruction en 1906. Pour honorer le compositeur baroque et commémorer le jour de son décès, il initia en 1909 le concert du 28 juillet.
Albert Schweitzer écrivit en 1906 : « C’est un régal de jouer une fugue de Bach sur cet instrument ; je n’en connais aucun autre où tout s’entend de façon aussi claire et précise ».
Une transformation complète de l’orgue a été effectuée entre 1977 et 1979 par la maison de facteurs d’orgue strasbourgeoise Alfred Kern, qui restaura partiellement la disposition et la traction mécanique d’origine dans l’esthétique de Jean-André Silbermann. Cela a permis de lui rendre son charme et sa splendeur d’antan.
La console, en fenêtre, est entièrement neuve mais copiée sur l’ancienne, qui n’a pas pu être réemployée lors de la grande restauration. La console d’origine est aujourd’hui conservée et exposée dans l’église au pied des escaliers menant vers les tribunes.
Orgue de chœur Dalstein-Haerpfer
Le premier orgue de chœur était un petit instrument que Jean-André Silbermann construisit juste après avoir repris les ateliers de son père. L’instrument fut posé en 1737 sur le jubé et servit comme orgue provisoire jusqu’en 1741, date à laquelle Jean-André Silbermann reprit son orgue pour le revendre.
Au seuil du XXème siècle de nombreuses voix s’élevèrent pour demander que l’orgue historique soit remplacé par un nouvel orgue plus dans l’air du temps. Albert Schweitzer s’y opposa et proposa la restauration de l’ancien instrument et la construction d’un orgue de chœur. Le Chapitre de Saint-Thomas lui donna raison.
C’est en 1905 que la maison Dalstein-Haerpfer de Boulay posa son instrument dans l’église Saint-Thomas. Il a été construit par Frédéric Haerpfer d’après une composition d’Albert Schweitzer. Ils ont réussi à créer une synthèse originale de l’orgue post-romantique allemand et de l’orgue symphonique français, d’autant plus que ses sonorités post romantiques très différentes des sonorités baroques du grand orgue Silbermann, les complètent parfaitement. L’orgue a été inauguré le 11 février 1906 par Albert Schweitzer.
Le buffet est en chêne. Son style est fortement influencé par celui du grand orgue Silbermann. L’orgue est posé sur le mur séparant la croisée du transept et le transept sud. Le buffet est dessiné par Henri Salomon. On fit le choix de l’unité visuelle : tourelle centrale trilobée en grand élément central, ornementation cohérente avec l’approche « néo-classique ».
En 1917, les tuyaux en étain sont réquisitionnés par les autorités allemandes et ont été remplacés en 1921 par une façade en zinc.
En 1934, Georges Schwenkedel exécute quelques transformations. Il revient en 1948 pour remplacer la façade temporaire par de nouveaux tuyaux en étain.
Vers 1960, Ernest Muhleisen puis Alfred Kern en 1979 effectuent de petites interventions.
En 2001, l’orgue a été restauré dans son été d’origine de 1905 par Quentin Blummenroeder. L’orgue a été inauguré le 25 novembre 2001 par François Menissier avec l’ensemble Ripieno dirigé par Daniel Leininger avec Mathieu Trunk au violon.
L’église Saint-Thomas abrite une riche collection de monuments funéraires, épitaphes et plaques commémoratives, érigés entre 1130 et 1965 et dédiés à des personnalités ayant marqué l’histoire de la ville. Ce riche patrimoine a une valeur historique, culturelle et religieuse importante et permet de comprendre l’évolution des représentations et pratiques funéraires à travers les siècles.
Un ouvrage Epitaphes et monuments funéraires. Eglise Saint-Thomas Strasbourg, réalisé par le pasteur Jean Arbogast et disponible à l’accueil de l’église, dresse l’inventaire complet de cette riche collection.
Parmi les monuments les plus célèbres, on peut citer le mausolée du Maréchal Maurice de Saxe, le sarcophage de l’évêque Adeloch, la dalle funéraire de Nicolas Roeder ou encore le monument de Christophe-Guillaume Koch.
Mausolée du Maréchal Maurice de Saxe (fond du chœur)
Maurice de Saxe est né à Goslar en Allemagne, le 28 octobre 1696, fils adultérin de Frédéric Auguste Ier, électeur de Saxe puis roi de Pologne, et de Marie-Aurore, comtesse de Koenigsmark.
Célèbre pour ses qualités d’homme de guerre, après avoir combattu les français et les suédois et servi sous les ordres de son père, il se met au service de la France en 1720 lors de la guerre de succession de Pologne.
Commandant en chef de l’armée française, il remporte la bataille de Fontenoy en présence du roi Louis XV en 1745 dans la guerre de succession d’Autriche opposant les troupes françaises et une coalition de troupes hollandaises, autrichiennes et anglaises. En récompense de ces services, Louis XV lui offre le château de Chambord en 1748 dans lequel le maréchal-général de France s’éteignit en 1750.
La première pensée du roi de France à la mort de Maurice de Saxe fut de l’inhumer en la basilique royale Saint-Denis mais ses conseillers lui interdisent parce qu’il était protestant, étranger et bâtard.
Par décision royale, le cœur, les entrailles et le corps du Maréchal de Saxe sont transférés à Strasbourg, la principale ville protestante du royaume. Ils reposent sous le monument conçu par Jean-Baptiste Pigalle érigé dans le chœur de l’église Saint-Thomas en 1777.
Dans une composition équilibrée, le maréchal est représenté au moment où il s’avance, descendant les marches vers la tombe, le bâton du maréchal à la main et la tête ceinte d’une couronne de laurier. Cette attitude dénote le sang-froid et la bravoure du guerrier.
A sa droite au-dessus des étendards brisés, les ennemis de la France sont représentés sous forme d’animaux symboliques : le lion hollandais, le léopard anglais et l’aigle autrichien.
A la gauche du maréchal s’élèvent les drapeaux de la France déployés et victorieux. Au pied desquels un génie funéraire en larmes a renversé le flambeau.
La France représenté sous les traits d’une jeune femme est assise sur les marches entre le maréchal et le cercueil. En larmes, elle s’efforce de retenir Maurice de la main droite alors que de la gauche elle tente de repousser la mort, qui l’attend en bas à droite de la composition. Le sablier à la main, elle annonce que son heure est venue et montre le cercueil soulevant le couvercle.
A gauche de la composition, Hercule, symbole de la force, vêtu de sa peau de lion et s’appuyant sur sa massue ressent une profonde douleur par la mort du héros.
Le cercueil porte les armes du prince traversées de deux bâtons de maréchal et ornées de l’ordre de l’aigle Blanc de Pologne.
Les figures de marbre blanc se détachent parfaitement d’un fond plus foncé composé d’une pyramide en marbre gris placée devant un mur de marbre plus sombre.
Jean-Baptiste Pigalle avait fait murer toutes les fenêtres du chevet pour donner à son œuvre une ambiance sépulcrale. Ce n’est qu’en 1985 lors des grands travaux de restauration de l’église que les fenêtres ont été réouvertes laissant ainsi à nouveau pénétrer la lumière. Des nouveaux vitraux représentant la course du soleil à travers sont conçus et installés par le sculpteur et maître verrier français Gérard Lardeur (1931-2002).
Sarcophage Adeloch (bras sud du transept)
Adeloch, précepteur de Louis le Pieux le fils de Charlemagne, devint grâce à sa noblesse et son mérite, le 27ème évêque de Strasbourg de 817 à 822.
Avec ce sarcophage, les chanoines ont voulu honorer l’évêque, bienfaiteur du chapitre et bâtisseur, qui les a soutenus trois siècles plus tôt lors de la reconstruction de l’église, qui tombait en ruine, et la fondation de l’école avoisinante.
Ce sarcophage, plus ancien monument funéraire abrité dans l’église Saint-Thomas, aurait été exécuté vers 1130 par le maître de l’atelier d’Eschau selon l’historien de l’art Robert Will. Cette sculpture romane constitue l’un des joyaux de l’art alsacien. Aujourd’hui, il se situe dans le bras sud du transept de l’église.
Réalisé en grès jaune et de forme trapézoïdale rappelant celle des ouvrages du Ve au VIIe siècle, il repose sur quatre lions qui en assure la garde. Il comporte quatre panneaux et un couvercle angulaire rattaché au cercueil par des crampons de fer, faisant office de toit.
- Face avant : sous des arcades, au centre, le Christ nimbé et assis est tourné vers le côté droit. Sa main gauche est posée sur l’évangile tandis que sa main droite est levée donnant la bénédiction. Face à lui, un évêque, Adeloch, tonsuré et le genou à terre tient la crosse de sa main gauche et prête serment de sa main droite. A la gauche du Christ, un ange nimbé tien dans ses mains l’étole destinée à l’évêque.
- Face arrière : sous des arcades, au centre, l’évêque Adeloch portant étole, crosse et Bible accomplit une fonction importante de son ministère : la visite de l’église dont il a la charge. Ici l’église est représentée sous les formes d’une femme tenant un rameau à la main.
- Face latérale droite : deux sarments de vigne entrelacés portent chacun une grappe de raisin. L’ensemble symbolise la communion du Christ.
- Face latérale gauche : un homme assis sur un trône tend une bannière à un autre qui, agenouillé devant lui, la saisit de ses deux mains. Selon l’historien de l’art Robert Will, cette scène représenterait Louis le Pieux remettant à l’évêque Adeloch le gonfanon, symbole des droits régaliens. La noble dame assise à droite de la scène représenterait l’Eglise de Strasbourg intercédant pour le prélat.
Dalle funéraire Nicolas Roeder (bras nord du transept)
Cette étrange dalle funéraire est celle du riche praticien, Nicolas Roeder. Dans son testament, il commande pour son inhumation deux monuments : la tombe elle-même et un Mont des Oliviers, représentant l’arrestation de Jésus, déplacé par la suite dans la cathédrale de Strasbourg. C’est un signe majeur de son statut social et de sa richesse.
En grès, elle montre un corps décharné et en décomposition, de taille réelle, couché sur une natte tressée, la tête reposant sur une sorte de traversin.
Une inscription en vers et en langue allemande gravée en lettres gothiques entoure la pierre sépulcrale : « Ce qui me reste c’est ce que j’ai donné. Ce que j’ai gardé m’a abandonné. O Dieu, donne à nous tous la vie éternelle ». Cette épitaphe rappelant la fragilité et la vanité des choses humaines fait écho à des versets bibliques des évangiles de Matthieu (10, 39), Luc (17, 33) ou Jean (12, 25) sur le thème de perdre sa vie.
Au XVe siècle de nombreuses confréries appelaient à la repentance et assuraient une préparation à la mort en affirmant que les richesses, les honneurs et les pouvoirs n’avaient aucunes valeurs au moment de la mort.
Ce type de dalle funéraire n’a donc rien d’exceptionnel à la fin du Moyen-Age. Du fait aussi des nombreuses épidémies comme la peste ou la lèpre faisant rage, les hommes tissent une nouvelle relation avec la mort et notamment sa représentation. Ils voient la nécessité de préparer son salut par une vie terrestre exemplaire, idée qui se traduit dans la conception des monuments funéraires.
L’anonymat des artistes était la règle au Moyen-Age, nous ne pouvons faire que les hypothèses quant à l’artiste qui a réalisé ce monument funéraire. Cependant, sur la bande du haut, la date 1510 (date de la mort de Nicolas Roeder) et un signe, un écu de forme contournée, sont gravés au-dessus de la tête du transi. D’après l’historien de l’art Roland Recht, il s’agirait de la marque du sculpteur de Veit Wagner qui dirigeait un atelier de sculpture renommé à Strasbourg.
Monument funéraire Christophe-Guillaume Koch (bras nord du transept)
Christophe-Guillaume Koch, né le 9 mai 1737 à Bouxwiller et mort le 25 octobre 1813 à Strasbourg, est un juriste, universitaire et homme politique alsacien, membre de l'Institut. (Plus d’informations sur sa fiche dans personnages célèbres de St-Thomas)
Comme l’indique l’inscription, ce sont ces collègues de Saint-Thomas qui ont fait ériger ce monument en son honneur. Il est l’œuvre de Landolin Ohmacht (1760-1834), sculpteur allemand actif à Strasbourg, qui a d’ailleurs sculpté trois autres monuments funéraires abrités à l’église Saint-Thomas (Jérémie-Jacques Oberlin, Frédéric-Charles-Timothée Emmerich et François-Daniel Reisseissen).
Le buste du professeur se trouve placé au fond sur une espèce d’autel antique. A la base du piédestal est assise, sur une roche, la Ville de Strasbourg sous la forme d’une jeune femme méditative, aux traits et au costume grec, et présentant une couronne de feuille de chêne savant dont elle pleure la perte. A la droite du monument est assis un génie en larmes, tenant dans ses bras des rouleaux de papier qu’il montre du doigt et qui figurent les ouvrages de Koch.
Le monument ne fut posé qu’en 1816, soit trois années après la mort de Koch. Il se situe dans le bras nord du transept.
Parmi les nombreux autres monuments remarquables, on peut citer ceux de Jean Taler, de Sébastien Brant, du colonel Kanofski ou encore les plaques commémoratives de Martin Bucer et d’Albert Schweitzer.
Monument funéraire Jean Taler (bras nord du transept)
Jean Taler est un chevalier autrichien mort et inhumé à Strasbourg en 1356. Sa pierre tombale en grès jaune se situe dans le bras nord du transept de l’église Saint-Thomas.
Dans une sculpture en ronde-bosse, le défunt est représenté en costume militaire d’époque, le manteau sur l’épaule, le casque sur la tête et l’écusson suspendu au ceinturon de l’épée.
A l’origine, les armes de Taler étaient sculptées sur l’écusson mais ont été enlevées à coups de marteau à l’époque de la Terreur, pendant la Révolution Française.
Le personnage est placé sous une arcature gothique décorée de roses à cinq pétales.
Représenté comme s’il était debout de face, il devait être en réalité en position couchée comme un gisant, les pieds posés sur le dos d’un chien, symbole de fidélité. A partir du XIVème siècle, la présence de représentation d’animaux se multiplie sur les monuments funéraires. Dans l’esprit de l’époque, ces animaux (oiseaux, dragons, lions ou chiens) sont les gardiens du tombeau et apportent protection dans l’au-delà.
Épitaphe Sébastien Brant (1ère travée de la nef côté sud)
Sébastien Brant, humaniste et juriste alsacien, principalement célèbre comme auteur de la Nef des fous, est né en 1457 et mort le 10 mai 1521 à Strasbourg, où ses parents tenaient une auberge. Issu d’une modeste famille, il n’en reçoit pas moins une excellente éducation, d’abord à Sélestat puis à l’Université de Bâle où il fait des études de droit.
Il publia en février 1494, chez Bergmann d’Olpe, son chef d’œuvre Das Narrenschiff qui le rendit célèbre dans l’Europe entière grâce aux traductions et aux nouvelles éditions. Il s’agit d’un poème satirique et moralisant d’environ 7000 vers en langue allemande répartis en 112 chapitres, chargé de citations classiques et bibliques ainsi que de proverbes et dictons en langue vulgaire. Brant y dénonçait les vices contraires à la morale divine et à la raison humaine. Chaque chapitre était illustré d’une magnifique gravure dont une grande partie fut sans doute réalisée par le jeune Dürer.
Il revient à Strasbourg en 1500, où il s’installa jusqu’à sa mort. Il devient le plus haut magistrat de la cité. Nommé en 1503 secrétaire de la Ville (« Stadtschrieber »), il réorganisa les archives de la ville et il devient conseiller impérial de l’empereur Maximilien.
Sa pierre tombale fut commandée par la Ville pour rendre hommage à cet illustre personnage. D’abord hébergée en la Cathédrale, elle a été déplacée dans divers lieux notamment dans l’ancienne bibliothèque municipale au Temple Neuf incendié en 1870, puis abritée à l’Eglise Saint-Thomas, sa dernière et actuelle demeure.
En 2021, où on a célébré le 500ème anniversaire de son décès, une restauration de l’épitaphe a été cofinancée par les universités de Bâle, Fribourg et Strasbourg ainsi que la Ville.
Des écus de part et d’autre des dernières lignes étaient autrefois peints aux armes de la famille. Sur celui de droite on voyait une roue noire sur fond blanc, l’emblème de l’ancêtre des Brant, qui possédait un moulin à Spire. Sur celui de gauche était représenté un morceau de bois enflammé, l’emblème de Sébastien qui s’était donné comme nom Titio (le tison), à l’exemple d’autres humanistes.
Dalle funéraire du colonel Kanofski (bras sud du transept)
Frédéric-Louis Kanofski von Langendorf, mort à Strasbourg le 24 novembre 1645 à l’âge de 53 ans, est une figure de la guerre de Trente Ans. Originaire de la région de Heilbronn, il était au service du roi de France dans l’armée en tant que colonel puis de l’Union Protestante.
La figure du colonel Kanofski est sculptée en relief sur la pierre tombale en grès rose. Le défunt est représenté en armure des pieds à la tête, tenant le bâton de commandant à la main dans la tradition médiévale du chevalier-gisant. Mais si le thème rappelle les modèles médiévaux, ce n’est pas le cas du style empreint d’un certain maniérisme dans la pose adoptée par le défunt.
Monument commémoratif Martin Bucer (dernière travée de la nef côté sud)
Martin Bucer, théologien, réformateur strasbourgeois et européen, est né à Sélestat le 11 novembre 1491 et mort à Cambridge en Angleterre le 28 février 1551.
Martin Bucer est une personnalité, qui a marqué la ville de Strasbourg en devenant tout comme Jacques Sturm un porte-parole du mouvement évangélique strasbourgeois, à la fois vis-à-vis des autorités municipales, des représentants de l'Église catholique et des mouvements radicaux dissidents. (Plus d’informations sur sa fiche dans personnages célèbres de St-Thomas)
Comme le mentionne l’inscription, le monument est consacré au grand homme de la Réforme et fut érigé par le Chapitre de Saint-Thomas en 1891 à l’occasion du 400ème anniversaire de sa naissance.
Le sculpteur badois Jean Riegger, établi à Strasbourg, a exécuté le buste de profil en marbre blanc, montrant l’humaniste coiffé et habillé comme un contemporain de l’artiste. Le médaillon est inséré dans une stèle de type néo-gothique.
Plaque commémorative Albert Schweitzer (narthex côté sud)
Plaque en souvenir du docteur Albert Schweitzer, qui a beaucoup œuvré pour Saint-Thomas : organiste, sauvegarde et conservation de l’orgue Silbermann, création de l’orgue de chœur, initiateur des concerts du 28 juillet en hommage à Jean-Sébastien Bach, dont il a voulu commémorer le jour de la mort. (Plus d’informations sur sa fiche dans personnages célèbres de St-Thomas)
D’autres monuments funéraires et personnalités sont encore à découvrir tel que le monument en marbre à la mémoire de Jérémie-Jacques Oberlin ou le mausolée de Jean-Daniel Schoepflin.
En plus des deux orgues et de la riche collection des monuments funéraires, l’église Saint-Thomas abrite de nombreux autres trésors.
Les vitraux (rosace, chœur et nef)
Seul le médaillon central de la rosace de la façade, figurant l’apparition à saint Thomas, a conservé jusqu’à aujourd’hui ses vitraux à plomb médiévaux. Au Moyen-Age, la technique du vitrail consiste en une composition formée de plusieurs pièces de verre maintenus par un réseau de plomb.
Fabriquée vers 1250, il s’agit d’une rosace à un oculus octolobé central entouré de seize grands médaillons disposés par huit dans deux cercles concentriques. Il est exactement de la même facture que les deux roses de la façade méridionale du transept de la Cathédrale (portail de l’horloge astronomique).
La verrière est mise en verre blanc en 1822 après le passage d’une tempête sauf pour la partie centrale qui a été conservée et restaurée en particulier l’apôtre et la partie inférieure du Christ. En 1842, les motifs végétaux des panneaux du pourtour sont remis en couleur.
La rosace est classée monument historique depuis 1862 au titre d’immeuble.
Au niveau du chœur, le sculpteur Jean-Baptiste Pigalle avait fait murer au XVIIIème siècle toutes les fenêtres du chevet pour donner à son œuvre, le mausolée du Maréchal de Saxe, une ambiance sépulcrale.
C’est seulement lors des grands travaux de restauration de l’église en 1985 que les fenêtres murées du chevet ont été réouvertes. Des nouveaux vitraux sont conçus et installés par le sculpteur et maître verrier français Gérard Lardeur (1931-2002).
Ces vitraux laissent à nouveau pénétrer la lumière dans le chœur mettant en valeur l’imposant mausolée du Maréchal de Saxe et suggérant à travers la course du soleil le mystère de la mort et de la résurrection selon la symbolique répandue au Moyen-Age.
Le long du bâtiment, les vitraux garnissant les fenêtres hautes de la nef se distinguent par la richesse de leur ornementation (motifs végétaux et architecturaux) et l’éclat de leurs couleurs. Ils datent probablement du début du XIVème siècle époque où l’église fut agrandie et couverte de voûtes mais durent évidemment être restaurés plusieurs fois par la suite.
La partie inférieure des vitraux a été détruite au temps de la Réforme, soit pour répandre plus de lumière dans l’édifice notamment pour que les fidèles puissent lire les cantiques, soit parce qu’ils contenaient des représentations de saints alors victimes de l’iconoclasme protestant. En effet, au cours du XVIème siècle plusieurs chefs religieux protestants, notamment Jean Calvin à Genève, incitèrent à la destruction des images religieuses, des icônes et des crucifix. Leur vénération était assimilée par eux à une adoration idolâtrique et relevait donc du paganisme. Les premiers actes iconoclastes se produisirent dans l’espace germanique par exemple en 1524 à Strasbourg.
Deux vitraux figuratifs encore existants :
- Le Christ en croix : au bas de la seconde fenêtre en partant de la gauche de la nef côté nord, un Christ en croix, d’un dessin assez original, est entouré d’une inscription en langue allemande sur une banderole blanche « Il a été immolé par amour pour nous et a porté nos péchés ». La poutre verticale portant les lettres INRI (acronyme de l’expression latine Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum « Jésus le Nazaréen roi des Juifs ») se prolonge jusque dans le ciel. Les deux branches de la poutre horizontale se courbent pour former un cœur avec les bras du Christ crucifié. Son visage semble apaisé.
- Marie couronnée : dans la fenêtre de droite du transept nord se trouve un autre vitrail figuratif. Il s’agit de deux médaillons superposés. Celui du haut représente le couronnement de Marie. Jésus, lui-même couronné et le sceptre à la main, y est assis sur un trône comme le roi des cieux donnant la bénédiction à sa mère agenouillée devant lui. Dans le médaillon inférieur, deux anges tenant chacun solennellement un candélabre se font face pour accompagner l’évènement. La « croix-arbre-de-vie » en fleurs dans le quadrilobe à la pointe du vitrail donne sa perspective à la scène.
La fresque de saint Michel terrassant le dragon
Cette fresque de style gothique tardif attribuée au peintre Jost Haller représente le combat de l’archange saint Michel.
Elle fut mise à jour lors de la restauration de l’église en 1885. Elle se situe à l’emplacement de la chapelle Saint-Michel érigée en 1290 et détruite lors de travaux d’agrandissement de l’église au XIVème siècle. Dans l’iconographie médiévale occidentale et les siècles suivants, saint Michel est représenté le plus souvent terrassant un dragon qui symbolise Satan.
Cette fresque fait partie après celle de saint Christophe tenant l’enfant Jésus dans l’abbatiale Saints-Pierre-et-Paul de Wissembourg datant du XIVème siècle des plus grandes de leur genre en France.
Son auteur Jost Haller est un peintre alsacien du XVème siècle, qui fut également actif en Lorraine, reconnu pour ses portraits de chevaliers et ses paysages. On peut découvrir la riche production de cet artiste un peu oublié au Musée Unterlinden de Colmar. Il a été le prédécesseur et le modèle de Schongauer, le grand peintre alsacien.
Les cloches
Au-dessus des voûtes surplombant l’orgue Silbermann au dernier étage de la tour se trouve les cloches de l’église Saint-Thomas.
De la Révolution française seule la plus grande cloche, un bourdon (la 2) de 1486 pesant 3,6 tonnes refondu en 1783 dans l’atelier strasbourgeois Edel, l’une des plus belles cloches d’Alsace, a survécu aux évènements.
En 1810 a été rajouté la cloche dite « du Notre-Père », pesant environ 350kg et de sonorité la bémol 3.
En 2009, quatre cloches supplémentaires ont été fondues à l’occasion du premier rassemblement des protestants de France dans l’atelier Bachert à Karlsruhe en Allemagne : Amour (2,1 tonnes, di dièse 3), Foi (1,4 tonnes, mi 3), Espérance (1,1 tonnes, fa dièse 3) et Témoins Ensemble (800kg, la 3).
L’ensemble, qui constitue l’une des plus grosses sonneries protestantes de France, permet de varier les sonneries et de ménager la cloche historique. La sonnerie a été mise en harmonie avec celle de la Cathédrale.
Les lustres
Les trois lustres, situés dans le vaisseau principal de la nef fabriqués en laiton durant la 1ère moitié du XIXème siècle, sont classés monuments historiques depuis le 25 février 1983 au titre d’objet.
Le baptistère
Le baptistère daterait de la fin du XVème siècle, hypothèse confortée par sa forme octogonale et par le bas-relief fait d’entrelacs de végétaux qui cerne le bord.
Dans l’église ancienne, le chiffre 8 renvoyait l’idée qu’il y aurait un 8ème jour de la Création succédant au 7 jours figurant dans le livre de la Genèse. De plus, le Christ était ressuscité le 8ème jour, le chiffre 8 est un symbole de vie nouvelle, de résurrection et de renaissance dans laquelle on entre par le baptême.
Longtemps laissé à l’abandon à l’extérieur de l’église, il a été installé vers 1975 sur un nouveau socle à côté de l’autel.
La chaire
Faite de chêne massif, la chaire date de 1804. Sur l’abat-son (auvent), un Jésus enseignant, et sous la chaire, des épis de blé et une grappe de raisin, évoquent le principe luthérien : « L’Eglise est l’assemblée des croyants parmi lesquels l’évangile est prêché fidèlement et les saints sacrements (baptême et Sainte-Cène) administrés conformément à l’évangile » selon l’Article 7 de la Confession d’Augsbourg de 1530.